Pervenit ad nos
Louis VII bannit de son royaume les apostats qui revenaient à la religion juive, sous peine de mort ou mutilation.
Ludovicus Dei gratia rex Francorum et dux Aquitanorum universis ecclesie Dei fidelibus in perpetuum. Pervenit ad nos quosdam iudeorum ad christianam fidem conversos denuo instigante diabolo ad iudaismum fuisse reversos. Quod quoniam ad ignominiam nominis Christi, ac christiane relligionis contemptum, vehementer pertinere cognovimus, tante presumptionis iniuriam regii terrore precepti inihibendam esse decrevimus. Statuimus igitur et regia auctoritate sanctimus ut quicumque deinceps iudeorum per baptismi gratiam in Christo renati ad sue vetustatis errorem revolare presumpserint in toto regno nostro remanere non auderant et si capi poterint vel capitali dampnetur iudicio vel membrorum portione multentur. Ut autem nostre preceptionis edictum perpetuo perserveret nullaque possit a posteris infirmatione rescindi, scripto commendari, sigilli nostri impressione signari, nostrique nominis subter inscripto karactere coroborari precepimus. Actum publice Parisius anno ab incarnatione Domini nostri MCXLIIII, regni vero nostri VIII, astantibus in palatio nostro quorum nomina subtitulata sunt et signa. Signum Radulfi Viromandorum comitis, dapiferi nostri; s(ignum) Mathei camerarii; s(ignum) Mathei constabularii; s(ignum) Guillielmi buticularii. Data per manum Cadurci cancellarii.
Archives Nationales, Paris AE/II/154
Louis par la grâce de Dieu roi des Francs et duc des Aquitains à tous les fidèles de l’église de Dieu à perpétuité. Nous avons appris que certains juifs convertis à la foi chrétienne, à l’instigation du diable, sont revenus de nouveau au judaïsme. Pour cette raison, parce que nous savons que cela est étroitement lié à la honte du nom de Christ et au mépris de la religion Chrétienne, nous déclarons que l’outrage d’une si grande présomption doit être empêché par la menace d’un précepte royal. Donc nous établissons et nous confirmons par l’autorité royale que dorénavant tous les juifs nés de nouveau en Christ grâce au baptême qui auront l'audace de revenir à leur ancienne erreur n’osent rester dans notre royaume ; et qu’ils soient punis, si on les y prend, par la peine capitale ou par l'ablation des membres. Afin que le décret de notre décision soit conservé et qu’il ne puisse pas être révoqué à l’avenir par aucune abrogation, nous le confions à l’écrit et nous ordonnons qu’il soit marqué par l’empreinte de notre sceau et qu’il soit corroboré par le monogramme de notre nom écrit ci-dessous. Fait à Paris, en l’an mil cent quarante-quatre de l’incarnation de notre Seigneur, le septième de notre règne, dans notre palais, en présence de ceux dont les noms et seings sont énumérés ci-dessous. Seing de Raoul comte de Vermandois, notre sénéchal ; seing de Mathieu chambrier ; seing de Mathieu connétable ; seing de Guillaume majordome. Donné par la main de Cadurcius chancelier.
L. Fois
Le roi de France Louis VII, pris connaissance du fait que certains juifs baptisés sont revenus à leur foi précédente, pour entraver les autres apostasies et pour éviter les injures faites contre la religion chrétienne, ordonne que les relaps quittent son royaume sous peine de mort ou de mutilation. L’acte est issu du chapitre de Notre-Dame de Paris et est l’un des rares édits royaux de portée générale du XIIème siècle et peut-être l’un des premiers relatifs aux juifs. Etant donné le pouvoir des barons dans le royaume, on ne peut pas savoir où et comment il fut effectivement appliqué.
La politique de Louis VII est normalement considérée comme favorable à l’égard des juifs, au moins en comparaison à celle de son successeur Philippe Auguste. Les contemporains du souverain étaient du même avis, comme on peut le lire par exemple dans le Chronicon Sancti Petri Vivi Senonensis où Louis fut accusé d’honorer beaucoup plus les juifs que les chrétiens. Cependant, l’édit de 1144 – ainsi que d’autres épisodes significatifs – montre que la faveur du souverain n’était pas sans conditions, mais au contraire elle était liée aux intérêts de la couronne. La mise au ban des relaps, renforcée par la peine de mort, visait probablement à soutenir une politique active de conversion (comme en témoignaient aussi des sources rabbiniques contemporaines) peut-être liée à la nécessité de contenir la communauté juive, alors en forte expansion démographique.
conversion au christianisme ; conversion au judaïsme ; Juifs/Judaïsme
Notice n°272592, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»
Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait272592/.