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Foral de Évora

Auteur

Afonso I o Conquistador

Titre en français

Foral de Évora

Titre descriptif

Sur les droits de douane (De portagem)

Type de texte

foral

Texte

De portagem. . . . De carega de christianos de conelios V solidos. De carrega de mauris de coneliis I morabitinum. . . . De mauro quem uendiderint in mercato I solidum. De mauro qui se redimeret decimam. De mauro qui taliat cum suo domino decimam.

Langue

Latin

Source du texte original

R. de Azevedo, ed., Documentos medievais portugueses. Documentos régios, vol. 1, tome 1 (Lisboa, 1958), 371-373, at 372 ll. 19-23.

Datation

  • Date fixe : 28/04/1166

Aire géographique

Traduction française

Au sujet du portagem... Pour une charrette de lapins amenée par des chrétiens, 5 solidi. Pour une charrette de lapins apportée par des musulmans, 1 morabitinus… Pour un maure qu’ils ont vendu au marché, 1 solidus. Pour un maure qui s’affranchit lui-même, un dixième. Pour un musulman qui travaille avec son maître, un dixième. 1

1 . Je considère taliat ci-dessus (taliaverit dans la plupart des chartes qui descendent du modèle d’Évora) comme une forme du latin vulgaire taleare, « couper ». En portugais ancien, le verbe talhar (>lat. taleare) signifie « couper, diviser, adapter » ; « couper à travers (au sens de voyager par la voie la plus directe) » ; et « adopter, accepter, arranger » (Viterbo, Elucidário s.vv. talhar I et II). Taliat pourrait par conséquent signifier « travailler aux côtés », « voyager aux côtés » ou « arriver à un arrangement avec ». L’utilisation de pepigerit (3sg indicatif futur antérieur de pangere « fixer, faire venir, conduire ») à la place de taliaverit dans les forais de Penamacor (1209) et Proença a Velha (1218), qui descendent de la charte d’Évora, soutient la première et la dernière de ces possibilités : « aut cum domino suo pepigerit» (Herculano, PMH-LC i 539 and 578). Une description plus détaillée, mais plus tardive, de cette clause dans la notice 254481 §6 peut réconcilier ces lectures en rapportant que le musulman avait négocié une rémunération financière pour son travail (on présume qu’il assistait son maître au marché parce que l’instance la plus ancienne connue de cette clause se trouve dans le contexte de paiements du portagem).

Source traduction française

Claire Chauvin

Résumé et contexte

Ces clauses proviennent de la charte municipale des habitants d’Évora, écrite en 1166, quand la Reconquête au Portugal continuait à battre son plein. Évora, prise aux musulmans en 1165, était la seule ville à ne pas être reprise lors de l’offensive almohade de 1190-1191, et demeura seule aux mains des chrétiens dans le sud du Tejo.

Le foral d’Évora est lui-même basé sur le fuero perdu accordé aux habitants d’Ávila en Castille-León, et de ce foral descendent ceux qui sont inclus dans la famille des chartes d’Évora. 1 Les clauses citées ci-dessus se trouvent dans tous les forais de ce groupe, quoiqu’avec quelques variations dans un sous-groupe dérivé de la charte de Penamacor (1209).2

Le portaticus (en latin; portagem en portugais), basé sur le portorium de la loi romaine, était une taxe sur les biens apportés dans une ville pour la vente par des non-citoyens. 3 Parce que les musulmans et les juifs ne bénéficiaient généralement pas du statut de vizinho, « citoyen municipal » dans les municipalités où ils résidaient, ils étaient obligés de payer le portagem tout comme le faisaient les marchands d’autres localités. 4

Les extraits cités ci-dessus sont tirés d’une longue liste énumérant les droits de portagem pour différents types de marchandises (laine, sardines, etc.), dans quelques cas dépendant de l’unité de mesure (charrette, panier, etc.). De toutes les marchandises mentionnées, les marchands musulmans sont seulement mentionnés en relation avec la vente de lapins (indiqué comme pellibus coniliorum « peaux de lapins » dans certains forais descendant de cette charte d’Évora). 5 Des paiements sont également faits pour des transactions impliquant l’admission de trois sortes de musulmans (probablement des captifs) au marché : un esclave qui doit être vendu, un esclave musulman cherchant à racheter sa liberté, et un musulman accompagnant son maître pour l’assister dans son commerce. Ces paiements additionnels constituaient également une forme de portagem (voir notice 254481 §6).

Il n’y a pas de mention de paiements dus au titre du portagem par des marchands juifs dans cette liste ou dans aucun des forais de la famille de ceux d’Évora.

1 . Powers, “Creative Interaction” 63-64.

2 . Au sujet de la recension de Penamacor, constituée des forais de Penamacor (1209), Proença a Velha (1218), Idanha Velha (1229), Salvaterra (1229), Sortelha (s.d.), et Penagarcia (1256), voir Cunha, “Forais que tiveram por modelo o de Évora” 80 et passim.

3 . Les variantes en latin vulgaire dans les sources portugaises incluent portagium, portadigum, portadicus, portadico, portadgo, portalgo.

4 . Soyer, Persecution 52.

5 . Par exemple, les chartes de Covilhan (1186), Belmonte (1199), Alpendrinha (1202), Sarzedas (1212), Proença a Velha (1218), Proença a Nova (1244), et Vila Viçosa (1270).

Signification historique

Selon le texte ci-dessus, les musulmans marchands libres payaient 1 morabitinus par charette de lapins. La taxe correspondante payée par les marchands chrétiens est décrite comme 5 solidi. Il y a une limite concernant le nombre d’information que l’on peut glaner à partir de ce règlement : un essai pour comparer les droits d’entrée payés par les marchands chrétiens et musulmans doit prendre en compte le fait que la valeur du morabitino déclina au XIIIème siècle. Bien que le système libra – soldo – dinheiro fut introduit pendant le règne d’Alphonse III (1248-1279), les chartes qui étaient principalement des copies fidèles du modèle d’Évora continuèrent à être émises sans actualisation reflétant le changement des cours monétaires (e.g. Setúbal [1249], Aljustrel [1252], Mértola [1254], Portel [1262], and Garvão [1267]). 1 Beaucoup de taxes, incluant le portagem, auraient été payées en nature, et après la fin du XIIIème siècle, le morabitino devint une simple unité de compte.2

Également significatif, il n’est pas toujours clair de savoir dans les sources anciennes si les résidents musulmans et juifs de certains districts étaient obligatoirement soumis au portagem. Par exemple, la formulation dans la recension des chartes de Penamacor qui descendent du foral d’Évora est particulièrement ambiguë : « Istas portagines dent christiani et mauri qui non habitauerint in penamocor neque in suis terminis » (« Les chrétiens et les musulmans qui n’habiteraient pas à Penamacor ou dans ses limites donneront ces portagens »). 3

Les sources indiquent que les lettres d’exemption pour le portagem étaient accordées à certains individus musulmans et juifs (e.g. notice 254481 §26), la preuve pourtant de communautés entières exemptées du portagem, que ce soit par le roi ou le conseil municipal, est plus communément propre aux comunas juives. Par exemple, les comunas juives de Lisbonne, Porto, Viseu, Évora et Leiria reçurent des lettres de citoyenneté (cartas de vizinhança) et bénéficièrent des mêmes privilèges que les citoyens de la municipalité, incluant l’exemption du portagem. Dans certains cas, ces cartes étaient émises contre le paiement d’un droit de citoyenneté au conseil municipal. 4

D. Duarte (m. 1438), dans un effort pour réduire les fraudes et résoudre toute confusion concernant le portagem, émit une législation confirmant que les musulmans et les juifs ne pouvaient être considérés comme des vizinhos, ni être exemptés de toute taxe coutumière due au roi (conservée dans Ordenações Afonsinas ii.62 concernant les juifs ; ii.108 concernant les musulmans).

1 . Selon son édition dans Herculano, PMH-LC i 589-91, une copie du XIVème siècle du foral de Sobreira Formosa (1222) établit que les marchands chrétiens paient 15 solidi par charrette de lapins, tandis que les musulmans paient 1 maravedí. L’unique copie de ce foral (Arquivo Nacional da Torre do Tombo, Traslado do foral de Vila Nova, in Feitos da Coroa, Núcleo Antigo 432) n’est pas numérisée et je n’ai pas été en mesure de vérifier si cette lecture se trouve dans le manuscrit.

2 . Oliveira Marques, “A circulação e a troca de produtos” 524.

3 . Herculano, PMH-LC i 540.

4 . Ferro, Os judeus em Portugal no século XIV 62; Tavares, Os judeus em Portugal no século XV 186-87; Moreno, “A sentença do Rei D. João I.”

Textes apparentés inclus dans le corpus

Manuscrits

  • Arquivo Nacional da Torre do Tombo, Registo da Chancelaria de D. Afonso II, f. 12rb-vb (ca. 1217-1221); situation physique: Chancelaria régia, Chancelaria de D. Afonso II, liv. 1; situation précédente : Mç. 12 de forais antigos, n.º 3, Núcleo Antigo 479; code de référence PT/TT/CHR/A/1/479; détails sur http://digitarq.dgarq.gov.pt/details?id=3813593 ; numérisé sur http://digitarq.dgarq.gov.pt/viewer?id=3813593 docs 31-32 [l’édition citée ci-dessus est basée sur ce ms. ; les variantes dans PMH-LC viennent de ce ms.]
  • Arquivo Nacional da Torre do Tombo, Registo da Chancelaria de D. Afonso II (Cópia/Livro Novo), f. 7ra-va (c’est une copie du Registro énuméré ci-dessus; ca. 1222-23); situation physique: Chancelaria régia, Chancelaria de D. Afonso II, liv. 2; situation précédente: Forais antigos, mç. 12, nº 4; Núcleo Antigo 480; Colecção Costa Basto, 1; code de référence PT/TT/CHR/A/1/480 ; détails sur http://digitarq.dgarq.gov.pt/details?id=3813594 ; numérisé sur http://digitarq.dgarq.gov.pt/viewer?id=3813594 docs 21-22 [l’édition dans PMH-LC est basée sur ce ms.]
  • Arquivo Nacional da Torre do Tombo, Traslado do foral de Évora. Copie effectuée à la demande de D. Jean II par l’infante D. Béatrice, signée par le Dr. Vasco Fernandes de Lucena. La date de la copie n’est pas lisible. Selon F. N. Franklin, il s’agit d’une traduction portugaise de la charte (Memória 106). Situation physique : Feitos da Coroa, Núcleo Antigo 475; situation précédente : Forais antigos, mç. 11, n.º 15; code de référence PT/TT/FC/001/475; détails sur http://digitarq.dgarq.gov.pt/details?id=4604158 (non numérisé) [en piètre état de conservation; c’est probablement la troisième copie du ms. mentionnée dans l’édition dans PMH-LC]
  • Arquivo Nacional da Torre do Tombo, Livro de forais velhos, ff. 76vb-78rb (XVIème siècle); situation physique : Leitura Nova, liv. 42; situation précédente: Leitura Nova, Forais Velhos ; code de référence PT/TT/LN/0042; détails sur http://digitarq.dgarq.gov.pt/details?id=4223233 ; numérisé sur http://digitarq.dgarq.gov.pt/viewer?id=4223233 docs 174-77
  • ** Arquivo Nacional da Torre do Tombo, Traslado do foral de Serpa. Bien que la couverture arrière de ce cahier établit qu’il contient aussi bien le foral de Serpa que le foral d’Évora (sur lequel le foral de Serpa est basé), et bien que F. N. Franklin le liste comme une copie manuscrite du foral d’Evora (Memória 106), ce cahier semble seulement contenir le foral de Serpa, c’est une copie, datée de 1492, de la charte émise par D. Dinis en 1295. Situation physique: Feitos da Coroa, Núcleo Antigo 464; situation précédente: Forais antigos, mç. 11, n.º 4; code de référence PT/TT/FC/001/464 ; détails sur http://digitarq.dgarq.gov.pt/details?id=4604206 ; numérisé sur http://digitarq.dgarq.gov.pt/viewer?id=4604206

Editions

  • A. Herculano et al., eds., Portugaliae monumenta historica. Leges et consuetudines (hereafter PMH-LC), vol. 1, fasc. 3 (Lisbon, 1863), 392-93.

Etudes

  • A. Herculano et al., eds., Portugaliae monumenta historica. Leges et consuetudines, vol. 1, fasc. 1-6 (Lisboa, 1856-68).
  • J. de Santa Rosa de Viterbo et al. Elucidário das palavras, termos e frases que em Portugal antigamente se usaram e que hoje regularmente se ignoram, 2 vols. (Lisboa 1865, repr. 1965).
  • H. Baquero Moreno, “A sentença do Rei D. João I, contra os judeus de 1412”, Lucerna. Centro de Estudios Humanísticos. Homenagem a D. Domingos de Pinho Brandão (Porto, 1984), 411-15.
  • R. Blasco, “El problema del fuero de Ávila”, Revista de archivos, bibliotecas y museos 60 (1954), 7-32.
  • M. C. Cunha, “Forais que tiveram por modelo o de Évora de 1166”, Revista da Faculdade de Letras: História 5 (1988), 69-94.
  • H. da Gama Barros, História da administração publica em Portugal nos seculos XII a XV, 2nd ed., T. de Sousa Soares, ed., vols. 1, 2, 6, and 10 (Lisboa 1945-50).
  • A. H. de Oliveira Marques, “A circulação e a troca de produtos”, in M. H. da Cruz Coelho et al., eds., Portugal em definição de fronteiras: do condado portucalense à crise do século XIV, Nova História de Portugal 3 (Lisboa, 1996), 487-528.
  • A. H. de Oliveria Marques, History of Portugal. Vol. 1. From Lusitania to Empire (New York, 1972).
  • F. N. Franklin, Memória para servir de índice dos foraes das terras do reino de Portugal e seus domínios (Lisboa, 1816).
  • J. C. Garcia, O espaço medieval da Reconquista no sudoeste da Península Ibérica (Lisboa, 1986).
  • I. Gonçalves, “Portagem”, in . J. Serrão , ed., Dicionário de história de Portugal, vol. 5 (Porto, 1981), 122-23.
  • A. M. Hespanha, História das instituições. Épocas medieval e moderna (Coimbra 1982).
  • J. F. Niermeyer, Mediae Latinitatis Lexicon Minus (Leiden, 1976).
  • M. J. Pimenta Ferro, Os judeus em Portugal no século XIV (Guimarães, 1979).
  • M. J. Pimenta Ferro Tavares, Os judeus em Portugal no século XV, vol. 1 (Lisboa, 1982).
  • J. F. Powers, “The Creative Interaction between Portuguese and Leonese Municipal Military Law, 1055 to 1279”, Speculum 62.1 (Jan. 1987), 53-80.
  • F. Soyer, “Muslim Slaves and Freedmen in Medieval Portugal”, Al-Qanṭara 28.2 (Jul-Dec 2007), 489-516.

Mots-clés

affranchissement ; chrétiens ; citoyenneté ; citoyenneté ; commerce ; droits de douane ; esclaves ; Juifs/Judaïsme ; marché ; musulmans ; statue

Auteur de la notice

Anna   MATHESON

Collaborateurs de la notice

Marisa   Bueno  :  relecture

Claire   Chauvin  :  traduction

Comment citer cette notice

Notice n°254662, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»

Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait254662/.

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