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Livre des Assises de la Cour des Bourgeois[Chapitre 207]

Auteur

Livre des Assises de la Cour des Bourgeois

Titre en français

Livre des Assises de la Cour des Bourgeois

Titre descriptif

Sur ceux qui cachent un esclave volé

Type de texte

Assise

Texte

Ici orres quei dreit deit on faire de celuy qui tient en son hostel un esclaf ou une esclave emblee des puis que le banc est cries par la vile par conge de la cort. Cil avient que I esclaf ou une esclave soit enblee ou fortraite et soit mucee en aucune maison : la raison iuge et coumande que tantost come la cort sait se, si det faire crier par la vile au criour, que il ni ait nul tant hardi qui cele ne qui recete celuy maufait quil nel fasse assaver a son seignor qui perdu la. Et celuy qui le selera ci est en la merci de Dex et dou seignor, se sur ce celuy ou cele nest rendue. La raison coumande que celuy sur qui lon trovera lesclave quil ait emblee ou mucéé et ne la vost rendre quant le banc se cria, si deit estre pendus sans nul deboutement, et tout can que il a si deit est[re] dou seignor par dreit. Mais se hon trovet lesclaf en aucun hostel vut, et que lesclaf se fust amuce, et on li demandet "qui te mist y ci," et lesclaf le metet sur aucun: la raison iuge quil nen deit mie estre creus par son dit, ne celuy nen deit aver nul mau, se plus nen y avet de reconoissance, encores fust ce que il amast ou haist celuy sur qui il le meyst. Mais se celuy esclaf diseit "sire, ie baillai ce que ie pris de vos, ie le baillai a tel persone," et il i a maintes persones qui aient celui veu parler ou esclaf plusor fois: la raison dit et comande que la cort deit celuy arester et metre en gehine por veyr ce il rendra ce que il a pris de celui esclaf, et se il le recounuist, si le devent iuger les iures en tant come il veront que monte ce que celuy avet receu de lesclaf ou de lesclave, et ce est dreit et raison par lasize.

Langue

français

Source du texte original

E.Kausler, Les Livres des Assises et des Usages dou Reaume de Jerusalem sive Leges et Instituta Regni Hierosolymitani (Stuttgart: Adolf Krabbe, 1839), 230.

Datation

  • Entre 1229 et 1244
  • 13ème siècle (quart : 2 )
  • Précisions : Les assises de la Cour des bourgeois ont été écrites au milieu du XIIIe siècle, probablement pendant la domination chrétienne de Jérusalem, entre 1229 et 1244 et après 1240, quoiqu’une partie du texte ait été écrite après les années 1260.

Aire géographique

  • Chypre ; Palestine
  • Les assises ont été écrites à la fin du royaume de Jérusalem au milieu du XIIIe siècle, mais se sont également appliquées au royaume de Chypre.

Traduction française

Ici vous entendrez ce que l'on doit faire de celui qui tient un ou une esclave volé dans sa maison, après que la proclamation a été faite dans toute la ville avec l'autorisation de la cour. S'il arrive qu'un ou une esclave est volé ou enlevé et est caché dans une autre maison, la loi juge et ordonne qu'aussitôt que la cour le sait, elle doit faire proclamer le crieur public dans toute la ville que personne n'ait l'audace de cacher ou recevoir ce méfait, ou de ne pas le faire savoir à son seigneur qui l'a perdu. Et celui qui le cache est donc à la merci de Dieu et du seigneur, si l'esclave n'est pas rendu après. La loi ordonne que celui avec qui est trouvé l'esclave qu'il a volé ou caché, et qui ne veut pas le rendre après que la proclamation est faite, doit être pendu sans délai, et toute sa propriété doit passer au seigneur, selon le droit. Mais si on trouve l'esclave dans une maison vide, et l'esclave s'y est caché, et on lui demande "qui t'a caché ici", et l'esclave en accuse quelqu'un, la loi juge qu'il ne doit pas y être cru sur parole, ni doit aucune personne en être dérangé, s'il ne s'en souvient pas aucune autre chose, même s'il arrive qu'il aime ou déteste celui qu'il accuse. Mais si l'esclave dit "monsieur, j'ai donné ce que j'ai pris de vous à untel", et qu'il y a beaucoup de personnes qui ont vu cet homme parler avec l'esclave en plusieurs occasions, la loi dit et ordonne que la cour doit l'arrêter et l'emprisonner, afin de voir s'il va rendre ce qu'il a pris de l'esclave, et s'il l'admet, les jurés doivent juger qu'il doit rembourser ce qu'ils jugent être le montant de ce qu'il a reçu de l'esclave, et ceci est juste et raisonnable selon les assises.

Source traduction française

A. Bishop

Résumé et contexte

Cette assise ordonne qu'une personne qui vole un esclave doit être pendue. Si on ignore l'identité du voleur, l'accusation faite par l'esclave ne suffit pas pour arrêter quelqu'un. Si l'esclave vole à son maître et donne l'article volé à une autre personne et qu'il y a d'autres témoins, celui qui a reçu l'article volé doit être condamné à une amende.

Signification historique

Le droit romain s'occupait bien du vol, du recel, et de la corruption d'esclaves dont il est question dans Cod. 6.2 et Dig. 11.3. Comme dans cette assise, le Code (6.2.4) dit que celui qui persuade un esclave de s'enfuir et puis le cache peut être poursuivi par le maître de l'esclave, bien que le droit romain ne prévoie pas la peine de pendaison pour un tel crime. Cette assise résulte peut-être de deux lois collées ensemble, puisqu'il mentionne soudainement un esclave qui a volé quelque chose à son maître. La peine d'une amende pour celui qui reçoit l'article volé est beaucoup moins sévère que la peine de pendaison pour celui qui cache un esclave fugitif ou volé. Il est probable que l'assise se laisse influencer par Cod. 6.2.14 et 20, qui prévoient une action contre celui qui reçoit d’un esclave des biens volés. En tout cas, ce que nous intéresse dans cette assise, c'est le fait que les esclaves étaient normalement musulmans. Cela n'est explicité que rarement, bien que les assises mentionnent que les esclaves pouvaient être affranchis en se convertissant au christianisme, ce qui également implique qu'ils étaient musulmans ou au moins non-Chrétiens (ou bien non-catholiques), car les Chrétiens ne pouvaient être esclaves selon le droit des croisés.123 L'assise précédente montre aussi que, dans l'esprit des croisés, les musulmans étaient associés à la servitude.

1 . H.Mayer, "Latins, Muslims, and Greeks in the Latin Kingdom of Jerusalem," History 63 (1978), repr. in Probleme des lateinischen Königreichs Jerusalem (Aldershot, 1983), 175 et 185.

2 . J. Prawer, Crusader Institutions (Oxford: Oxford University Press, 1980), 208-211.

3 . J.S.C. Riley-Smith, The Feudal Nobility and the Kingdom of Jerusalem, 1174-1277 (London: Macmillan, 1973), 62-63.

Textes apparentés inclus dans le corpus

Manuscrits

  • Les assises de la Cour des bourgeois nous sont parvenues par trois manuscrits médiévaux : Bayerische Staatsbibliothek cod. Gall. 51 (Chypre, c. 1315), BNF ms. fr. 19026 (incomplet, Chypre, milieu du XIVe siècle), et Biblioteca Nazionale Marciana ms. fr. app. 6 (Chypre, 1436). BNF ms. fr. 12207 est une copie du XVIIIe siècle du manuscrit Marciana.
  • Il existe également une traduction italienne du manuscrit Marciana, Marciana cod. it. cl. II, no. 47 (Venise, 1534), et une copie de cette traduction, BNF ms. ital. 29 (XVIe siècle).
  • Les manuscrits français ont également été traduits en grec, et nous sont parvenus par deux manuscrits : BNF ms. grec 1390 (Chypre, 1469) et BNF ms. grec suppl. 465 (Chypre, 1512).

Editions

  • A.Beugnot, "Assises de la Cour des Bourgeois", in Recueil des historiens des croisades, Lois, vol. 2. Paris: Académie royale des inscriptions et belles-lettres, 1843, repr. Farnborough: Gregg, 1967.
  • N.Coureas, The Assizes of the Lusignan Kingdom of Cyprus. Nicosia: Cyprus Research Centre, 2002.
  • V.Foucher, Les Assises du Royaume de Jérusalem (textes français et italien), vol. 1, pt. 1: Assises des Bourgeois. Rennes: Blin, 1839.
  • E.Kausler, Les Livres des Assises et des Usages dou Reaume de Jerusalem sive Leges et Instituta Regni Hierosolymitani. Stuttgart: Adolf Krabbe, 1839.
  • C.Sathas, "Assizai tou Basileiou ton Ierosolymon kai tes Kyprou", in Mesaiunikes Bibliothekes, vol. VI. Paris, 1877.

Traductions

  • N.Coureas, The Assizes of the Lusignan Kingdom of Cyprus. Nicosia: Cyprus Research Centre, 2002.
  • V.Foucher, Les Assises du Royaume de Jérusalem (textes français et italien), vol. 1, pt. 1: Assises des Bourgeois. Rennes: Blin, 1839.
  • C.Sathas, "Assizai tou Basileiou ton Ierosolymon kai tes Kyprou", in Mesaiunikes Bibliothekes, vol. VI. Paris, 1877.

Etudes

  • H.Meyer, "Latins, Muslims, and Greeks in the Latin Kingdom of Jerusalem," History 63 (1978), repr. in Probleme des lateinischen Königreichs Jerusalem (Aldershot, 1983), 175-192.
  • J.Prawer, Crusader Institutions (Oxford: Oxford University Press, 1980).
  • J.Riley-Smith, The Feudal Nobility and the Kingdom of Jerusalem, 1174-1277 (London: Macmillan, 1973).

Mots-clés

esclaves ; musulmans

Auteur de la notice

Adam   Bishop

Collaborateurs de la notice

Capucine   Nemo-Pekelman  :  traduction

Claire   Chauvin  :  relecture

Comment citer cette notice

Notice n°136967, projet RELMIN, «Le statut légal des minorités religieuses dans l'espace euro-méditerranéen (Ve- XVesiècle)»

Edition électronique Telma, IRHT, Institut de Recherche et d'Histoire des Textes - Orléans http://www.cn-telma.fr/relmin/extrait136967/.

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