> Extrait

Apollonios de Rhodes, Argonautiques, 2, 864-898 Vian-Delage.

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Date du texte cité

IIIe siècle av. J.-C.

Texte (version originale)

Καί νύ κ' ἔτι προτέρω τετιημένοι ἰσχανόωντο,

865 εἰ μὴ ἄρ' Ἀγκαίῳ περιώσιον ἔμβαλεν Ἥρη

θάρσος, ὃν Ἰμβρασίοισι παρ' ὕδασιν Ἀστυπάλαια

τίκτε Ποσειδάωνι· περιπρὸ γὰρ εὖ ἐκέκαστο

ἰθύνειν, Πηλῆα δ' ἐπεσσύμενος προσέειπεν·

"Αἰακίδη, πῶς καλὸν ἀφειδήσαντας ἀέθλων

γαίῃ ἐν ἀλλοδαπῇ δὴν ἔμμεναι; Οὐ μὲν ἄρηος

ἴδριν ἐόντά με τόσσον ἄγει μετὰ κῶας Ἰήσων

Παρθενίης ἀπάνευθεν, ὅσον τ' ἐπιίστορα νηῶν.

τῶ μή μοι τυτθόν γε δέος περὶ νηὶ πελέσθω.

Ὣς δὲ καὶ ἄλλοι δεῦρο δαήμονες ἄνδρες ἔασι,

τῶν ὅτινα πρύμνης ἐπιβήσομεν, οὔ τις ἰάψει

ναυτιλίην. Ἀλλ' ὦκα, παραιφάμενος τάδε πάντα

θαρσαλέως ὀρόθυνον ἐπιμνήσασθαι ἀέθλου."

Ὣς φάτο· τοῖο δὲ θυμὸς ὀρέξατο γηθοσύνῃσιν.

Αὐτίκα δ' οὐ μετὰ δηρὸν ἐνὶ μέσσοις ἀγόρευσεν·

"Δαιμόνιοι, τί νυ πένθος ἐτώσιον ἴσχομεν αὔτως;

οἱ μὲν γάρ ποθι τοῦτον ὃν ἔλλαχον οἶτον ὄλοντο·

ἡμῖν δ' ἐν γὰρ ἔασι κυβερνητῆρες ὁμίλῳ

καὶ πολέες. Τῶ μή τι διατριβώμεθα πείρης·

ἀλλ' ἔγρεσθ' εἰς ἔργον, ἀπορρίψαντες ἀνίας."

Τὸν δ' αὖτ' Αἴσονος υἱὸς ἀμηχανέων προσέειπεν·

"Αἰακίδη, πῇ δ' οἵδε κυβερνητῆρες ἔασιν;

Οὓς μὲν γὰρ τὸ πάροιθε δαήμονας εὐχόμεθ' εἶναι,

οἱ δὲ κατηφήσαντες ἐμεῦ πλέον ἀσχαλόωσι.

Τῶ καὶ ὁμοῦ φθιμένοισι κακὴν προτιόσσομαι ἄτην,

εἰ δὴ μήτ' ὀλοοῖο μετὰ πτόλιν Αἰήταο

ἔσσεται, ἠὲ καὶ αὖτις ἐς Ἑλλάδα γαῖαν ἱκέσθαι

πετράων ἔκτοσθε· καταυτόθι δ' ἄμμε καλύψει

ἀκλειῶς κακὸς οἶτος, ἐτώσια γηράσκοντας."

Ὣς ἔφατ'· Ἀγκαῖος δὲ μάλ' ἐσσυμένως ὑπέδεκτο

νῆα θοὴν ἄξειν· δὴ γὰρ θεοῦ ἐτράπεθ' ὁρμῇ.

Τὸν δὲ μετ' Ἐργῖνος καὶ Ναύπλιος Εὔφημός τε

ὤρνυντ', ἰθύνειν λελιημένοι. Ἀλλ' ἄρα τούς γε

ἔσχεθον, Ἀγκαίῳ δὲ πολεῖς ᾔνησαν ἑταίρων.

Traduction

Et ils seraient restés plus longtemps encore arrêtés par leur angoisse, si Héra n'avait inspiré à Ancaios une audace extraordinaire, Ancaios, qu'Astypalaia avait enfanté pour Poséidon auprès des eaux imbrasiennes. En effet, il était particulièrement doué pour gouverner un navire. Il courut vers Pelée, et lui parla ainsi :

« O Aiacide, comment serait-il honorable de délaisser la lutte et de rester si longtemps dans un pays étranger ? Ce n'est pas tant pour mon habileté à la guerre que pour ma science des navires que Jason m'a amené loin de Parthénia, vers le pays de la toison. Que l'on abandonne donc, grâce à moi, la moindre crainte au sujet du navire. D'ailleurs, il y a ici d'autres hommes habiles: faisons monter à la poupe n'importe lequel d'entre eux; aucun ne mettra l'expédition en péril. Aussi, va vite communiquer ces avis, et, plein de hardiesse, encourage nos compagnons à se souvenir de leurs travaux. »

II dit ainsi, et le cœur de Pelée bondissait de joie. Aussi ne tarda-t-il pas à venir parler au milieu des héros : « Mes seigneurs, pourquoi rester ainsi plongés dans une douleur vaine? Car ces hommes ont succombé à la mort qui leur était destinée. Mais, dans notre réunion, nous avons des pilotes, et en nombre. Aussi, loin de différer le voyage, réveillez- vous au travail, libres de toute inquiétude. »

Le fils d'Aison, plein d'embarras, lui répondit : « Aiacide, où sont-ils ces pilotes ? Car ceux dont nous vantions jadis l'habileté, ceux-là maintenant ont la tête basse, et sont encore plus affligés que moi. Aussi, je prévois pour nous un sort aussi funeste que celui des morts : s'il ne nous est pas possible d'aller jusqu'à la ville du cruel Aiétès, ni de retourner vers la terre d'Hellade, en passant au large des roches Cyanées, c'est ici même que nous ensevelira sans gloire une mort misérable, succédant à une vieillesse inutile. »

II parla ainsi, mais Ancaios promit avec empressement qu'il dirigerait le navire rapide; car il était entraîné par un élan venu de la déesse. Mais, après lui, Erginos, Nauplios et Euphémos se levèrent, désireux de prendre le gouvernail : on les arrêta, car la plupart des compagnons acceptaient Ancaios avec faveur.

Source de la traduction

Traduction de La Ville de Mirmont modifiée

Paraphrase/Commentaire sur le texte

Le livre I (v. 185-87) avait présenté Ancaios comme un orgueilleux qui se flatte d'être un excellent pilote. Ce détail trouve ici sa concrétisation, mais on est passé d'une présentation plutôt négative à une vision positive du personnage dont l'audace permet de sortir les Argonautes des difficultés où les a mis la mort de Tiphys. Il faut noter qu'il ne fait pas part de son initiative à Jason mais à Pélée ; la réaction de Jason est à l'image de l'abattement général des Argonautes. La manoeuvre d'Ancaios est habile car il ne se présente pas comme unique pilote possible, sans nommer cependant ses concurrents. Ceux-ci dès qu'ils se manifestent sont écartés au profit d'Ancaios qui a pris les devants.

Rédacteur du commentaire

C. Cusset

Indexation

Comment citer cette notice

Texte n°87403 dans CALLYTHEA [En ligne]; http://www.cn-telma.fr/callythea/extrait87403/. Première version : 31/03/11. Date de mise à jour : 06/10/12

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