> Extrait

Lycophron, Alexandra, 171-179.

<< < / > >>

Date du texte cité

IIIe siècle av. J.-C.

Précisions : (datation incertaine)

Texte (version originale)

                     Ἐν δὲ δεμνίοις

τὸν εx ὀνείρων πέμπτον ἐστροβημένον

εἰδωλοπλάστῳ προσκαταξανεῖ ῥέθει,

τὸν μελλόνυμφον εὐνέτην Κυταϊκῆς

τῆς ξεινοβάκχης, ὅν ποτ' Οἰνώνης φυγάς,

μύρμων τὸν ἑξάπεζον ἀνδρώσας στρατόν,

Πελασγικὸν Τυφῶνα γεννᾶται πατήρ,

ἀφ' ἑπτὰ παίδων φεψάλῳ σποδουμένων

μοῦνον φλέγουσαν ἐξαλύξαντα σποδόν.

Traduction

Et, dans son lit, le cinquième (époux), bouleversé au sortir de ses rêves, elle le caressera de son corps imaginaire, lui qui, lors de futures fiançailles, sera l’époux de la Cytaïque, l'hospitalière en délire, lui qu'un jour le fugitif d'Oinônè, qui changea en hommes une hexapode armée de fourmis, son père, engendra pour en faire un Typhon pélasgique, lui qui sur sept enfants incinérés par la braise seul de la brûlante cendre réchappa.

Source de la traduction

traduction Chauvin/Cusset modifiée

Paraphrase/Commentaire sur le texte

L'un des thèmes liés à Hélène qui semblent chers à Lycophron n'est autre que celui de ses époux successifs. Ces vers s'intéressent à Achille, cinquième époux d'Hélène, après Thésée, Ménélas, Pâris et Déïphobe.

Il est intéressant de souligner que, dans la version de Lycophron, Hélène fait languir Achille dans ses rêves en lui montrant une image fabriquée (εἰδωλοπλάστῳ, 173). Cette version prolonge, en l'étendant aux noces avec Achille, le thème de l'image trompeuse d'Hélène qui accompagne Pâris à Troie. Il est assez remarquable que la mention des noces qui unissent, en rêve, Hélène et Achille soit immédiatement suivie par une allusion au mariage d'Achille et de Médée («la Cytaïque folle d'un étranger [= Jason]») aux Enfers. Ce choix permet de rapprocher la figure d'Hélène de celle de Médée, ce qui fait sens dans le cadre du discours portant sur les rapports entre Europe et Asie, car les rapts d'Hélène et de Médée constituent des épisodes emblématiques du conflit séculaire entre ces deux continents.

La deuxième partie du passage évoque l'histoire d'Achille, fils de Pélée qui fut lui-même exilé d'Oinônè (= Égine) par son père Éaque pour avoir tué son demi-frère Phôcos. Pélée s'établit en Phthie, contrée que peuplèrent les Myrmidons, nés de la métamorphose de fourmis. Lycophron semble rattacher cette métamorphose à l'époque même de Pélée et à son action (la version la plus connue situe cependant cette métamorphose à Égine: cf. Hésiode, fr. 205 Merkelbach-West; Pindare, Néméennes, 3, 13-14; Pseudo-Apollodore, Bibliothèque, III, 12, 6 ; scholies à ce passage de Lycophron).

Pélée aurait eu de Thétis plusieurs enfants que celle-ci tentait de rendre immortels en les plongeant dans le feu (Lycophron prête ainsi à Thétis des traits qui l'apparentent à la magicienne Médée); seul Achille, arraché des flammes par Pélée, aurait survécu. La comparaison entre Achille et un «Géant pélasgique» peut suggérer que Lycophron connaissait une version de la tradition rapportée plus tard par Photius (Bibliothèque, codex 190, Bekker p. 152a, l.7 et selon laquelle Pélée aurait remplacé un os du pied d'Achille qui avait été brûlé par l'action de Thétis par un os retaillé dans le squelette du géant Damysos (le plus rapide des Géants) que Pélée aurait déterré de la Pallène.

Rédacteur du commentaire

É. Prioux

Indexation

Toponyme(s):

Oinônè

Commentaire iconographique 1

Commentaire

Pour tester l'immortalité de ses enfants, Thétis leur aurait fait subir l'épreuve du feu (Apollod. bibl. 3, 171; Apoll. Rhod. IV 865-879 [mais selon la scholie (fr. 300 Merkelbach/West) elle aurait plongé Achille dans l'eau bouillante]; schol. Hom. Il. 16, 37).

L'iconographie semble avoir retenu une autre version: celle que nous connaissons par Stace qui rapporte que Thétis aurait plongé Achille dans le Styx (Stat. Ach. I, 269; Hygin, fab. 107; Serv. ad Aen. 6, 57). Cette variante était connue bien avant, dès l'époque hellénistique, comme en témoigne la première représentation connue à ce jour de cet épisode : une bague en or qui montre la déesse tenant son fils par les pieds et le plongeant dans les eaux du Styx (Los Angeles, County Mus. of Art 61. 48. 2 : http://www.limc-france.fr/objet/14490). Ce schéma est repris par des oeuvres d'époque romaine et de l'antiquité tardive, entre le Ier et le Ve s. ap. J.-C. (LIMC s.v. "Achilleus" n° 5-11; 13-18; http://www.limc-france.fr/objet/718).

Objet(s) et image(s)

http://www.limc-france.fr/objet/14490

http://www.limc-france.fr/objet/718

Auteur du commentaire iconographique

N. Icard

Commentaire iconographique 2

Commentaire

Selon un épisode tardif de la légende d'Hélène, Achille aurait été son dernier époux. Les deux héros se seraient unis dans l'île de Leuké. Nous ne connaissons pas de représentation figurée assurée de cette fable que l'on a parfois cru reconnaître sur le "Vase Portland" et sur un relief d'Herculanum conservé au Musée de Naples, inv. 6591 (voir LIMC, s. v. "Helene" n°378-379).

Seul un miroir étrusque figurerait Hélène dans l'au-delà, mais Achille n'est pas présent parmi les nombreux héros de la guerre de Troie qui l'entourent (Paris, Cab. Méd. 1287 : http://www.limc-france.fr/objet/14807).

Objet(s) et image(s)

http://www.limc-france.fr/objet/14807

Auteur du commentaire iconographique

N. Icard

Comment citer cette notice

Texte n°260 dans CALLYTHEA [En ligne]; http://www.cn-telma.fr/callythea/extrait260/. Première version : 08/01/10. Date de mise à jour : 15/10/14

Mentions légales | Colophon | Contacts | Haut de page